Interview avec SAMUEL GAUTIER
Posté par patricksota le 19 août 2014
Interview avec SAMUEL GAUTIER
Samuel Gautier
Source de la photo : www.facebook.com
« J’exige de mes gardiens la primauté de l’excellence »
Samuel Gautier est un français amoureux du ballon rond. Mais son point fort réside dans la formation des gardiens de but. Voilà son domaine de prédilection.
Tour à tour, il a connu ici chez nous les clubs d’Inter Star et Vital’O avant de jeter son dévolu sur Lydia Ludic Burundi Academic. Un des clubs phares du pays.
Avant de prester au Burundi et sous d’autres cieux, il fut attaquant et gardien de but dans des clubs dits « modestes ».
Il émet son point de vue sur le niveau de nos gardiens de but et explique pourquoi ledit niveau est faible. Pourtant, selon ce sympathique entraîneur des gardiens, une solution est à notre portée si volonté il y a.
Même sur le plan international, Gautier est convaincu que nous avons des gardiens capables d’imprimer leurs marques. Pour autant qu’il y ait un suivi rigoureux et des moyens adéquats mis à leur disposition.
1) Samuel Gautier, bonjour. Vous vous êtes spécialisé dans l’encadrement et la formation des gardiens de but. Peut-on savoir votre parcours complet jusqu’ici ?
Mon parcours comme joueur a débuté en France, et a fini en Belgique. Tenez, de 1980 à 1994, les péripéties ayant jalonné ledit parcours sont les suivantes :
- Attaquant pupille ESPERANCE ARABE FC (Paris 18)
– Gardien de but pupille ESPERANCE ARABE (Paris 18)
– Gardien de but cadet FC LILAS (Paris) 3eme div. Paris
– Gardien de but cadet MONTREUIL FC (Paris) coupe de France 2 tours.
– Sélection District de Paris, sélection avec Bernard Lama du Paris Saint Germain
– Gardien de but Junior MONTREUIL FC (Paris)
– Sélection Nogent S/Marne, Division D’Honneur Régionale.
– Sélection Attaquant FC Mechelen (Belgique) D2 belge.
Mon parcours comme entraîneur des gardiens de but s’est fait ici au Burundi. Il y a 3 ans, je servais Inter star, ensuite Vital’O et cette année j’ai jeté mon dévolu sur Lydia Ludic Burundi Academic.
Côté formation, entendez par là les stages, je les dois à la Fédération Allemande de Football, puis une formation des gardiens acquise grâce à la FIFA, licence D Grassroots.
2) Comment appréciez-vous le niveau général des gardiens de but burundais ?
D’après ce que je vois depuis 3 ans, le niveau est moyen voire faible. Le manque d’encadrement pour les gardiens de but est une grossière erreur commise par les clubs. Car, comme pour les joueurs de champ, c’est un travail de tous les jours.
Nous sommes très peu à exercer ce métier au Burundi. Beaucoup de gardiens travaillent en solo, et ne se corrigent pas, puisqu’il n’y a pratiquement personne pour leur montrer les failles commises au cours des matchs. Donc, ils traînent avec des lacunes dommageables à leurs carrières. Cette responsabilité incombe aux clubs qui choisissent de travailler de manière non conforme aux exigences du football moderne. Les gardiens de but n’y sont absolument pour rien. Et sont plutôt victimes de cette démarche lacunaire.
3) Quelle dynamique faudrait-il impulser à nos gardiens de but pour qu’ils impriment véritablement leurs marques sur la scène internationale ?
Sur la scène internationale ? (Rire !) Tout d’abord, commencer par le début, c’est-à-dire que les clubs doivent donner les moyens adéquats aux gardiens quand ils s’entraînent. Et surtout, la FFB devrait obliger à chaque club de disposer d’un entraîneur pour les gardiens de but. Football moderne oblige. Lesdits entraîneurs suivraient perpétuellement des stages venant de la FIFA et d’autres instances sportives internationales pour améliorer sans cesse leur savoir. A partir de là, les gardiens de but burundais s’amélioreraient et pourraient alors imprimer leurs marques sur la scène internationale. Mais avant d’en arriver là, les résultats palpables issus de ces voies bien empruntées se remarqueraient ici lors des championnats locaux. L’ouverture sur l’international viendrait après. Il faut y aller étape par étape. Lentement mais sûrement. L’objectif final serait, bien entendu, d’attirer les convoitises des clubs européens ou même africains comme le TP Mazembe, l’Espérance de Tunis, Coton Sport de Garoua pour ne citer que ceux-là.
4) De votre point de vue, le niveau de nos gardiens de but va-t-il de pair avec le niveau de nos clubs ?
Oui, généralement, ça va de pair. Écoutez, la présence d’un entraîneur des gardiens doit coller avec une stratégie mise en place par l’entraîneur principal. Or, ici, celui qui entraîne les joueurs de champ cumule cette fonction avec le rôle dévolu aux entraîneurs des gardiens de but. Souvent, ce rôle est mal connu du coach principal, ou tout simplement le temps lui imparti peut lui faire défaut vu le volume de travail considérable dont il dispose en entraînant les joueurs de champ. Nos gardiens sont alors mis en déroute puisqu’ils doivent obéir à la stratégie du coach principal (celui qui entraîne les joueurs de champ) alors qu’il devrait y avoir une autre stratégie du gardien lui inculqué par son propre entraîneur. Clarifions les choses : les deux stratégies ne sont pas incompatibles. Elles sont complémentaires.
5) Actuellement, vous prestez dans le club de Lydia Ludic Burundi Academic. Avez-vous les moyens de vos ambitions ?
Oui, je me plais à LLB Academic, mes ambitions cadrent parfaitement avec celles du club : faire avancer nos gardiens de but selon les normes du football moderne. J’exige de mes gardiens la primauté de l’excellence.
6) Au sein de votre club, vous terminez deuxième de la Ligue A, 2013-2014. Cette place est-elle satisfaisante vu les efforts consentis pour obtenir la première place ?
Écoutez, nous sommes des compétiteurs, nous visons toujours la première marche du podium comme tous les clubs dignes de figurer en première division. Nos résultats se calculent sur les années passées et futures pour étudier notre progression. Ascendante ou descendante ? Je pense qu’elle est plutôt ascendante. Cette année, sur les 26 rencontres livrées en première division, nous n’avons perdu qu’une seule rencontre, moins de dix buts encaissés, beaucoup de buts inscrits, et une place honorable en fin de parcours. Côté gardiens de but au sein de LLB Academic, ils progressent bien et vite, ça m’enchante vraiment.
7) Quelle a été votre appréciation sur la prestation de Madede (le goal keeper de LLB Academic) durant le Championnat ?
La progression de Madede a été bonne au cours du championnat, nous l’avons constaté à chaque match. Il était confiant dans ses cages, ne perdait jamais le nord et communiquait parfaitement avec ses défenseurs. Voilà un garçon qui assimile bien les notions théoriques et pratiques apprises lors des entraînements. Bravo. Attention ! Le summum de sa carrière n’est pas encore atteint. Qu’il garde bien droit sa tête sur ses épaules, ça ne fait que commencer. (Rire !). Il faut dire que, dans l’ensemble, la prestation de mes gardiens au sein de LLB Academic est bonne. Les lacunes ont été comblées. Mais le chemin à parcourir reste long. Faut pas se leurrer ! Je salue tout de même la première sélection de Madede en Équipe Nationale senior du Burundi lors du match amical international ayant opposé à Nairobi le Kenya et le Burundi (0-0). D’après les échos qui me sont parvenus, Madede a été irréprochable sur toute la ligne. Et fait partie des joueurs burundais qui se sont bien défendus lors de ce choc. Pour moi, c’est un réel motif de satisfaction. Nous travaillerons d’arrache-pied pour que Madede reste sur cette trajectoire ascendante.
8) Quelle complémentarité doit-il y avoir entre un entraîneur des gardiens et un coach d’une équipe ?
Il faut qu’il y ait une parfaite communication entre les deux. Se faire mutuellement confiance et travailler ensemble pour un seul et même but : tirer nos garçons vers le haut en leur inculquant le meilleur de nous-mêmes.
9) Dans le cas d’espèce, comment travaillez-vous avec Etienne, le coach de LLB Academic ?
Concernant les entraînements des gardiens, nous avons en moyenne 5 séances par semaine de deux heures. J’ai un peu plus d’une heure par jour pour eux, la deuxième heure revient aux joueurs de champ. Parfois, mes gardiens ont une séance complète en jeu collectif pour améliorer leur prestation sur terrain. Mais il arrive aussi qu’ils aient des séances spécifiques les samedis ou les dimanches matins en plus des entraînements habituels en semaine. Lors des entraînements basés sur le jeu collectif, j ai la possibilité de rester proche des gardiens pour les aider à bien prester. Afin que cela leur soit bénéfique lors des matchs comptant pour le Championnat. Chose impossible à faire lors desdits matchs. C’est aux entraînements qu’il faut mettre le paquet.
10) Quel est, selon vous, le niveau des entraîneurs burundais ?
Le niveau des entraîneurs peut évoluer positivement si, concomitamment, la mentalité du club évolue dans le même sens. Si un club choisit un entraîneur, il faut que ce dernier ait les coudées franches pour exercer son travail. Lui donner tous les moyens nécessaires pour mener à bien ce travail. Et ensuite exiger des résultats. Hélas, au Burundi, les entraîneurs travaillent dans des conditions difficiles. Les juger nous obligerait à verser dans la subjectivité. Notons tout de même qu’il y a des entraîneurs qui ont déjà prouvé leur savoir-faire. Je pense notamment à Yaoundé de Vital’O qui, pour moi, est un exemple à suivre pour nos entraîneurs locaux. Voilà un coach chevronné dont le savoir-faire n’est plus à démontrer.
11) Quel regard portez-vous sur l’avenir du football burundais ?
C’est tout un système qui doit évoluer et changer. On ne construit pas une maison en commençant par le toit. Nous n’avons pratiquement pas de structures de formation pour nos jeunes. Pourtant, ce sont eux l’avenir du football burundais. Il n’y a qu’un ou deux stades convenables, c’est-à-dire permettant aux équipes de déployer sur terrain un beau jeu. Donner les moyens suffisants aux entraîneurs (salaires décents et matériels de travail) Sursaut patriotique oblige, nous devons marcher au rythme du football moderne comme l’ont commencé certains parmi nos voisins. Car, ce beau pays regorge de talents. Nous n’avons pas le droit de les décevoir en les négligeant. A bon entendeur salut !
Propos recueillis par Patrick Sota
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