


Découvrons Lauriel Dibady
« Que ce soit maintenant ou demain, je reste à la disposition du Burundi, mon pays. »
Lauriel Dibady est un jeune footballeur évoluant dans les rangs du club d’En Avant Estuaire FC du Gabon. Ayant une partie de sa famille au Burundi, il adore ce pays qu’il a connu dès le bas âge avant de partir sous d’autres cieux. Son âge le maintient sur une trajectoire ascendante. Qui plus est, son parcours jusqu’ici, son courage et ses ambitions promettent des lendemains qui chantent. Mieux : l’invité de notre Blog rêve de défendre les couleurs du Burundi via les Hirondelles. Quelle noble initiative ! Découvrez alors ce jeune talent en pleine effervescence. Il a, selon ses propres dires, du pain sur la planche pour atteindre la cour des grandes figures footballistiques. Rêve deviendra-t-il réalité ? Pour Lauriel Dibady, c’est un vrai défi qui lui est lancé. La balle est dans son camp dit-il, et son mental est au beau fixe pour surmonter toutes les épreuves l’attendant au tournant.
Lauriel Dibady, bonjour. Quel âge avez-vous et où vivez-vous ?
Né d’une mère burundaise et d’un père gabonais, je suis venu au monde le 24 février 1989. J’ai donc 22ans et vis actuellement à Libreville au Gabon.
Présentement, dans quelle équipe jouez-vous ?
En début de saison, j’ai signé avec le club d’En Avant Estuaire FC (ex Delta Téléstar Gabon). Mais au dernier Mercato, j’ai demandé à être prêté au club de FC Sapins qui est un club promu, mais beaucoup mieux structuré, plus ambitieux et respectant scrupuleusement les clauses relevant du contrat. Ce qui n’est pas toujours le cas de certains clubs de première division gabonaise. Idem aussi pour certains clubs africains car leurs statuts ne sont pas forcément à 100% professionnels. Et ce, par manque de moyens !
Sur terrain, quel est votre poste de prédilection ?
Je joue de préférence au numéro 9 (avant-centre). Et ma taille me le permet (1m86), poids (75 kgs). Avec ces deux atouts, je parviens à peser sur les défenseurs adverses. Comme qualité première, j’ai la vitesse malgré ma grande taille. Du coup, je peux très bien jouer sur les ailes vu ma technique balle au pied qui est assez bonne. Il m’est facile de déborder sur les flancs et de centrer la balle pour créer des occasions de but. A vrai dire, en attaque, je suis plutôt polyvalent.
Peut-on savoir votre parcours footballistique depuis le début jusqu’ici ?
Je suis un oiseau migrateur. (Rire !). Tout d’abord en 2005, j’ai quitté le Gabon où je jouais en club (cadet) pour le Centre de Formation de la Kadji Sport Academy au Cameroun (Douala). Centre qui a formé dès le bas âge les Samuel Eto’o, Djemba Djemba, Idriss Kameni, Nkoulou, etc. J’y ai passé 2ans et joué quelques matchs en deuxième division camerounaise. Car, j’étais toujours avec les cadets, mais classé parmi les meilleurs éléments de la deuxième division. De 2007 à 2008, j’ai joué au Chesnay 78 à 18ans à Versailles en région parisienne. De 2008 à 2009, j’ai évolué en deuxième division du championnat français à Manosque dans le sud de la France. De 2009 à 2010, j’ai été stagiaire pendant 6 mois à Sheffield FC (Unibond First Division) en Angleterre. Hélas, suite à une saison gâchée par des blessures et une mauvaise adaptation en Angleterre, j’ai dû quitter ce grand pays de football. Il faut dire que cela coïncidait avec ma dernière année de sport et d’études en Angleterre. Dans ma promotion, on s’arrangeait pour placer les meilleurs joueurs un peu partout dans certains clubs. Mais, il fallait préalablement avoir un agent pour vous guider. En Europe, sans agent, il devient difficile d’y faire carrière pour nous autres étrangers et surtout africains. J’ai donc pris l’option de tirer mes plans pour gérer moi-même ma carrière en rentrant en Afrique. Cela s’appelle reculer pour mieux sauter ! Ainsi et Dieu aidant, je retournerai en Europe avec un niveau me permettant de servir un grand club. Je le souhaite du fond du cœur et dois travailler très dur pour y arriver.
Avant de vous décrire tout ce parcours, j’aurais dû vous préciser que j’ai brillé au Burundi dans le Tournoi de l’Espoir où je suis sorti à la fois meilleur buteur et meilleur joueur du dit Tournoi. C’était en 1999, et j’étudiais cette année-là à l’Ecole Indépendante de Bujumbura. Jamais je n’oublierai les cinq ans ayant marqué mon enfance au Burundi, patrie que j’adore.
Comment se porte le football gabonais ?
Le football gabonais se porte assez bien même si les dirigeants et les politiques cherchent souvent à le tirer vers le bas et non vers le haut. Pourquoi ? Parce que les relations entre individus, entendez par là entre joueurs et dirigeants, priment sur toute autre chose. C’est dommage car il y a des talents qui sont étouffés en clubs ou en équipe nationale. Sinon, sur terrain, il y a des valeurs sûres qui peuvent aller très loin dans leurs carrières. Ces dernières ne demandent qu’à être mises dans de bonnes conditions pour s’épanouir.
Combien de clubs y a-t-il en première division du championnat gabonais ? Quel est pour l’heure le classement de votre club ?
Le championnat gabonais de première division est composé de 14 équipes. A la fin de la saison, les deux dernières équipes au classement descendent en deuxième division. Et les deux premières équipes de la deuxième division montent en Ligue A à l’issue des Play Off. Mon équipe occupe actuellement la 10ème place à six journées de la fin du championnat. Son maintien est plus ou moins assuré en première division. Pour un club promu, c’est pas mal comme prestation ! Rester en première division est son objectif principal. Après, la seconde étape consistera à faire partie des meilleures formations de la Ligue A.
Vous avez joué en France comme l’indique votre parcours. Avez-vous l’ambition d’y retourner pour servir un club de première division empreint d’une forte réputation sur la scène footballistique européenne ? Si oui, pensez-vous y arriver ?
Bien entendu ! Je l’ai clairement susmentionné. Pas plus tard que la saison prochaine, je compte y retourner. L’expérience gabonaise est juste un retour en arrière pour une remise en forme. J’ai gardé des contacts avec certains clubs du championnat français (semi-professionnel). Vous savez, le football de nos jours est aussi une histoire de chance car les footballeurs talentueux pullulent en Afrique. Mais, tous n’ont pas la chance d’aller émerger en Europe. Il est tout aussi évident que là-bas le travail et l’abnégation sont la condition sine qua non pour réussir. C’est sûr. Me concernant, j’en suis parfaitement conscient et dois poursuivre sans relâche mes efforts. Avoir un mental d’acier m’habite pour faire une excellente carrière. Sinon, les formations acquises au cours de mon parcours suffisent pour que je puisse me défendre honorablement. Reste à travailler le côté mental comme je viens de vous le dire. La balle est dans mon camp.
Pour la petite histoire, juste une anecdote : Saïdo Berahino et moi-même étions voisins au Burundi. Son grand-frère est d’ailleurs un ami de longue date. Déjà, dès le bas âge, Saïdo jouait au foot avec nous et parvenait à se démarquer parmi des garçons plus âgés que lui. Car, il était plus jeune que nous. Plusieurs années après, lui joue en Europe. Et pas n’importe où ! En Angleterre. Il faut signaler qu’il a eu la chance d’y aller très jeune et d’intégrer un centre de formation prestigieux, connu de tous. Je salue sa bravoure et son assiduité qui lui ont permis d’aller de l’avant en faisant partie des éléments de West Bromwich Albion FC. J’espère pour lui qu’il sera bientôt aligné parmi les onze meilleurs joueurs de cette équipe. Il est plein d’avenir ce garçon. Ce n’est pas pour rien qu’il a pu jouer pour la sélection anglaise des cadets lors de l’Euro 2009 et remporter la coupe de surcroît.
Vous aimeriez jouer pour les Hirondelles du Burundi selon vos dires. Pourquoi ?
Ecoutez Monsieur Sota, je mise beaucoup sur l’avenir du football burundais. C’est un avenir radieux. Pour l’heure, le football burundais est pauvre en moyens mais riche en talents. Avec l’actuel sélectionneur des Hirondelles, je vois bien le Burundi faire un pas de géant sur la scène internationale. Mais il faut l’aider en lui octroyant les moyens. Il est plein de courage cet entraîneur. Il est en train d’implanter une nouvelle philosophie au Burundi. Une philosophie axée sur le savoir-faire, la discipline, le travail et l’effort. Bravo ! J’espère que les dirigeants burundais comprennent le sens et l’essence de sa lutte. Fort de cette nouvelle philosophie, j’aimerais apporter ma modeste contribution aux Hirondelles. En m’associant aux autres footballeurs, je pense que nous pouvons aider le Burundi à imprimer ses marques sur la scène footballistique internationale.
Entre les Panthères du Gabon et les Hirondelles du Burundi, vous rêvez de servir la sélection nationale du Burundi. Pourquoi ?
Voyez-vous, il faut que je vous dise une chose : il y a malhonnêteté et ingratitude chez les dirigeants sportifs gabonais. Je garde un mauvais souvenir du Gabon quand j’étais au Cameroun. J’avais été présélectionné pour servir les Panthères du Gabon pour la CAN des cadets prévue au Togo en 2007 si je me souviens bien. La liste annoncée à la veille de cette compétition n’était pas la même que celle publiée le lendemain. Des modifications malencontreuses avaient été faites pour arranger des amis, des proches à telle ou telle autre personne influente. Résultat : en mettant de côté les critères de mérite et de compétence, le Gabon a été éliminé au premier tour avec 0 point !!!
Il se passe des choses au Gabon : parfois, vous devez être en bons termes avec les entraîneurs voire les payer pour être appelé en équipe nationale. C’est la triste réalité ! Beaucoup ne le savent pas ! Bien sûr, si vous êtes un professionnel reconnu en Europe, votre place en équipe nationale est garantie. Mais là aussi, attention ! Car, le relationnel peut l’emporter sur les facteurs de mérite et de compétence ! Si bien que certains joueurs professionnels ont du mal à imprimer leurs marques faute d’un système verrouillé ! Dommage !
Dernier point pour cette question : j’adore énormément ma mère. Elle serait comblée de joie en voyant son fils porter les couleurs de son pays. Et surtout, venir au stade me voir lui procurerait une joie indescriptible. Joie immense aussi bien pour elle que pour ma famille vivant au Burundi. D’ailleurs, je saisis cette opportunité pour exprimer ma profonde gratitude à ma très chère famille qui m’a toujours soutenu. Voilà pourquoi j’aime profondément le Burundi. C’est ma patrie.
Compte tenu de votre niveau actuel, êtes-vous capable de servir valablement les Hirondelles du Burundi ?
Absolument ! Mais je dois souligner ici qu’il faut fournir beaucoup d’efforts. Pas de cerise sur le gâteau. Pas du tout ! Le reste est une question de confiance avec le staff dirigeant. Confiance aussi avec les joueurs. J’ai encore une marge de progression pour devenir un très grand joueur. Je suis encore jeune et manque probablement l’expérience des compétitions internationales de très haut niveau. Il faut être honnête dans la vie. Mais, à force de jouer, ça viendra car l’appétit vient en mangeant. Jouant présentement en première division gabonaise, je me sens apte à servir les Hirondelles du Burundi dominées par des joueurs locaux. Le championnat gabonais doit, à mon humble avis, être au dessus du championnat burundais. Il n’y a qu’à voir la rencontre ayant opposé Missile FC du Gabon à Inter Star du Burundi en coupe de la CAF. J’étais au stade. Mais c’est clair qu’on ne peut pas juger tout un championnat via une équipe et une seule ! Dans tous les cas, le score ayant sanctionné cette rencontre (4-0 pour Missile) ne trompe pas ! Je vous répète que la maturité vient au fil des ans et des matchs livrés. Il faudra aussi tenir compte du sélectionneur du Burundi. S’il veut me faire confiance en m’essayant, je suis prêt à répondre à toutes ses aspirations. Il a beaucoup d’ambitions pour le Burundi, je le sais. Je serais heureux de lui apporter ma pierre d’édifice pour mener à bien ses nobles objectifs. Que ce soit maintenant ou demain, je reste à la disposition du Burundi, mon pays.

Propos recueillis par Patrick Sota
patricksota.unblog.fr